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Vingt ans en 1939 ( Troisième partie )
Vingt ans en 1939 ( 3 )
Première partie, lire ici
Deuxième partie, lire là
"Tous les « Vieux » sont partis. Les seuls qui restent à Agen sont la classe 39/1 et la classe 38 (dernier contingent ).
Le commandant a demandé aux soldats de s’occuper des 30 chevaux. Evidemment, j’accepte. Nous avions, en principe 2 chevaux chacun.
On les sortait le matin, les faisait boire, les brossait et on leur donnait du bon foin.
On mangeait à la caserne à 100 mètres de l’écurie.L’après-midi, nous promenions les chevaux sur les bords de La Garonne.
René Berthon sur "son" cheval
Photo familiale personnelle
Février 1941 : Il fait encore chaud, en ce mois -là !
Le commandant demande des volontaires pour aller au 15-2 à Montluçon ( 152 ème régiment d’infanterie ).
Avec les frères jumeaux Petit ,originaires de la Nièvre, nous sommes volontaires. Le départ doit avoir lieu à mon retour de permission. J’avais droit à quinze jours de permission car j’étais allé au front.
Pour rentrer en train, nous ne pouvons passer par Nîmes. Je passe donc par Lyon. J’arrive à la gare de Lyon Perrache et je traverse Lyon , à pieds, pour me rendre à l’autre gare de Lyon: La Part- Dieu.
Je rejoins Limoges et là je vois un militaire que je connaîs de vue.
Je lui dis : « Vous êtes un Giraud ?
-Oui, j’habite à Monestier.
J’avais reconnu Valentin Giraud que j’avais déjà vu chez Lucie Petit. Lui ne me reconnaissait
pas .
A notre arrivée à Montluçon , nous rentrons à Voussac et Monestier par un car gazogène qui fonctionne avec de grosses marmites et du bois ( sacs de bois de chaque côté ).
Je reste quinze jours chez mes parents, puis je retourne à Agen pour être ensuite muté à Montluçon, comme prévu par le réglement. (Voir plus ici pour la caserne Richemont de Montluçon.)
A mon arrivée à Agen, j’apprends que les autres sont déjà partis à Montluçon.
Je reprends donc le train pour Montluçon .
Me voilà donc reparti !
A mon arrivée à Montluçon, j’apprends qu’un bataillon est transféré à Lapalisse ( 27km de Vichy). On ne peut me garder à Montluçon et on me demande ce que j’ai fait dans l’armée et dans la vie. Je réponds : « Mortier 81 et cultivateur » .
On a besoin d’un cultivateur à Lapalisse . J’ai encore droit à 48 heures de permission avant d’intégrer Lapalisse où il y a des militaires, mais pas de caserne.
Je me rends à Vichy par le car TPN , puis je prends le train Vichy -Lapalisse. Vers 6 h du soir, je sors de la gare et lit « Lapalisse, 2km ».
Je pars à la recherche des militaires puisqu’il n’y a pas de caserne à Lapalisse .
J’arrive vers le pont sur la Besbre et vois un militaire qui monte la garde. ( Je n’ai jamais su ce qu’il gardait ).
Ce militaire me dit qu’il y a un lit de reste pour moi dans une vieille maison attenante au château. C’est le logement des 6 militaires qui prennent la garde toutes les deux heures.
Avant mon départ, ma mère m’avait préparé deux pigeons rôtis. J’invite les autres à manger avec moi à la cantine militaire. J’apprends que les repas ne sont pas préparés là , mais que la cuisine est à 3 km.
Le lendemain matin, je me rase et je dois me rendre à la gare du Tacot de Lapalisse où est le bureau du Commandant......"
( A suivre )
152 ème régiment d'infanterie ( extrait de Wikipédia )
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Commentaires
LMPT 73: Une vraie de vraie! Et là,il rejoint un des trois bataillons du 152ème régiment d'infanterie qui a échappé à la dissolution !
3daniel63Jeudi 19 Mai 2016 à 06:33Désorganisation complète du pays due à 20 années d'angélisme alors que , de l'autre côté , on fourbissait les armes ...
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Jeudi 19 Mai 2016 à 11:53
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Tu as de la chance de disposer de ces photos qui sont des données à la fois sentimentales et familiales, mais aussi historiques.
Merci à ton papa et à toi de nous en faire profiter et de raconter cette vie qui n'a rien d'ordinaire.
Nicole, je me suis désabonnée momentanément de ta lettre, le temps de déménager et de me reconnecter sur place car je ne pense pas pouvoir accéder à ma messagerie avant un certain temps... Bien sûr, je me réinscrirai avec plaisir dès que possible.
Bises,
eMmA
eMma: Merci.Tu sais , mon papa et internet, ça fait deux J'espère que le journal où il veut voir cette parution arrivera à l'accepter. Sinon, j'ai encore un plan B.
Pour le désabonnement, tu as raison car ta messagerie serait pleine pendant que tu n'es pas connectée.Tu pourras sûrement lire tes mails importants en 3G ou en 4 G.
Bon déménagement .La Vendée et ton joli atelier t'attendent .Bon courage et à bientôt!
6SimoneJeudi 19 Mai 2016 à 15:15Super ton reportage ! J' y vois, malheureusement quelques points communs avec la situation actuelle : désorganisation, débandade......chienlit aurait dit le grand Charles.
Te rends-tu compte combien sont précieux tes témoignages ? J' avais failli une fois, me servir du carnet de bord tenu par mon grand'père dans les tranchées pour le transcrire dans mon blog.
Merci j' espère que la suite va venir
Bises
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Jeudi 19 Mai 2016 à 19:35
Simone : Merci .Peut-être que tu as raison pour la "chienlit ".
Je ne rends pas vraiment compte que mes témoignages sont précieux, mais je suis ravie que tu les juges ainsi .
Ne t'en fais pas , la suite est écrite et tapée .Plus qu'à mettre sur le blog ! Et si tu es sage , tu auras même droit à un morceau enregistré.
Je suis certaine que le carnet de bord de ton grand-père est passionnant .
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Je ne pensais pas qu'il y avait autant de désorganisation, cela ne devait pas être simple pour les soldats qui devaient parcourir de nombreux km pour aller d'un endroit à l'autre.
Une nouvelle fois merci pour ce témoignage.In the mirror: Merci.Comme moi , tu ne devais pas être là .Mais la drôle de guerre et la débâcle, c'était ça !
Je vois très bien le pont sur la Besbre et la maison au pied du château à LAPALISSE, moi aussi, je me suis promené par là, eux, "on les a promenés" mais pour quoi faire au juste ???
Bises et bonne fin de semaine
Francis:Tu vas bientôt le savoir ! La ligne de démarcation passait à Lapalisse .Tu as peut-être lu dans le texte déroulant que le 152ème régiment d'infanterie avait été divisé en 3 bataillons ( v.ci-dessous ).Mais , dans le prochain article , tu verras que mon père a eu une autre fonction que de monter la garde .En Février 1941, Lapalisse ( 25km de Vichy) est toujours en zone libre .
L’attitude du 152ème RI lors de la Campagne de France de mai-juin,
associée à son brillant comportement lors de la Grande Guerre,
déjà souligné par le Maréchal Pétain, lui permet d’échapper à la
dissolution et devenir le Régiment de Tradition de l’Alsace au sein
de la 13ème Division Militaire de l’armée d’armistice.
1er bataillon et E.M. en garnison à Montluçon.
2ème bataillon ("bataillon d’honneur du Maréchal Pétain") à Vichy.
3ème bataillon en garnison à Lapalisse (mission de garde de la
ligne de démarcation).
( Extrait de wikipédia )
Au moins une chose qui marchait/roulait : le train !
Merci Nicole pour ces morceaux d'Histoire, la vraie, toujours aussi passionnants.L'organisation et la discipline étant les maîtres mots de l'armée, on a du mal à imaginer la situation décrite par ton père. Et pourtant, c'était exactement cela. D'où l'importance — j'allais dire la richesse — de ce type de témoignages, puisqu'ils nous rendent des instantanés qu'il nous est impossible d'imaginer autrement.
Merci encore une fois pour ce récit simple et si authentique.
Amitiés
Ramon
Ramon: Ton bon accueil de ce récit que tu qualifies de simple et authentique me conforte dans l'idée que j'ai bien fait de l'écrire.Les remerciements venant d'un écrivain tel que toi ,ne peuvent que me toucher .
Je vous mettrai , à la fin de ce témoignage, un enregistrement de mon père ( fait à son insu ) où il parle de cela Mais ce que j'écris ici est rédigé , à partir de notes prises manuellement comme mon père le voulait et que je lui ai relues après avoir rédigé sur papier.
15CornusVendredi 20 Mai 2016 à 22:35J'ai fait mon service militaire au 35° RI au sein de ce qu'on appelle aujourd'hui la 7° brigade blindée à laquelle appartient l'actuel 152° RI. Certes, cela n'a pas grand intérêt, mais disons que le 152° RI m'est revenu en mémoire en lisant ce récit.
Cornus : Voilà que tu as appartenu au même régiment que mon père ! Si je t'ai fait remémorer ces doux instants, voire recouvrer la mémoire, c'est une bonne chose .Ceci montre que le 15-2 ( mon père l'appelle ainsi ) existait toujours dans les années 90.
Pour le 15-2, on peut lire ici
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CornusSamedi 21 Mai 2016 à 13:10
Pas le même régiment, la même division ou brigade à mon époque et actuellement, mais pas en 39-45. Le 152° RRI existe toujours.
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Samedi 21 Mai 2016 à 13:44
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17héléneSamedi 21 Mai 2016 à 10:11Quel super récit que je suis avec beaucoup de plaisir car il respire la vérité, les soufrances et l'inutilité des massacres de la guerre. Et nos dirigeants qui envoyaient ces pauvres jeunes en restant bien les pieds au chaud dans leurs bureaux.. Ah, faire la guerre avec une carte, quelle gloire!
Hélène: Merci à toi ! Je crois que tu as bien raison sur le fait de faire la guerre avec une carte !
passionnant ce récit, merci à ton papa, ce fut une periode incroyable , il faut l'avoir vécu, je connais un peu Lapalisse, j'imagine monter la garde sur le pont de la Besbre ! le car TPN, le tacot, des souvenirs pour moi ! je n'avais que 13 ans en 40 ! donc la guerre c'était pour les autres ... mon père avait été appelé à la caserne de Montluçon en 1912, mais le 152 eme n'existait pas à ce moment, on l'a envoyé ensuite à Riom au 105 ème , pour aller combattre dans les Vosges en 1914... j'attends la suite ! car j'imagine que les aventures ne sont pas finies, dur dur pour les jeunes à cette époque, merci pour ce beau récit, bon weekend et grosses bises, merci pour ton gentil passage ...
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Samedi 21 Mai 2016 à 19:58
Renéjeannine : Merci au Bourbonnais d'origine Ton papa devait être au 121 iéme RI .Je te mets ici un reportage de LM sur ce régiment au moment de la guerre 14-18.
A 13 ans , tu as dû engranger des souvenirs très précis de cette époque.
Encore au moins un chapître pour ce récit .Bonne soirée et coucou à ton oncle qui doit pouvoir lire sur sa tablette ( super cadeau pour ses 96 ans )
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La Palisse... j'y suis allée si souvent pour les sons et lumière du Chateau. Nous partions des Biefs où nous étions en colo, dans les années 1956, 1958.
L'histoire de ton papa est celle de beaucoup d'hommes de cette région, (lis mon premier commentaire sur les pages précédentes) avec des allers et retours... ce que j'admire en ces soldats : ils étaient seuls à marcher sur les routes, presque abandonnés et ils se sentaient toujours être de l'armée... ! et pas une armée bien glorieuse !
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Dimanche 22 Mai 2016 à 18:56
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21daniel63Lundi 23 Mai 2016 à 08:52Prendre la tangente pour aller où ? Les routes étaient remplies de réfugiés n'ayant plus rien à bouffer , plus d'essence , cherchant à se loger ; l'armée essayait d'assurer la gamelle et le statut de militaire protégeait d'éventuelles embauches forcées par X ou Y ...
daniel 63: T'as raison.Mais quand tu passes à pieds si près de chez toi, je me voyais aller me cacher dans une ferme. Et un militaire déserteur aurait eu son sort réglé de manière funeste.C'est vrai que les militaires ne partaient pas en STO.
Je comprends pas.mon grand père a été mobilisé au 121ieme de Montluçon. Par ailleurs wikipedia donne Colmar comme garnison au 152 (qui existe toujours)...
Les deux régiments auraient coexistes en 40 à la caserne Richemont ? Pas impossible.-
Lundi 23 Mai 2016 à 19:50
- le 121ème régiment d’infanterie de 1913 à 1939 ;
- le 152ème régiment d’infanterie de 1939 à 1942 ;
- La caserne est occupée par les forces allemandes de 1942 à 1944 ;
- Les Forces Françaises de l'Intérieur de 1944 à 1945 ;
- le 92ème régiment d’infanterie de 1945 à 1958 ;
- le centre d’instruction du service du matériel de 1958 au 31 juillet 1976.
L’école préparatoire et de perfectionnement de la gendarmerie prend possession de la caserne Richemont le 1er août 1976. En 1984, elle prend l’appellation d’école de sous-officiers de gendarmerie puis celle d’école de gendarmerie en 1998.
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... ce récit est passionnant et déroutant à la fois. On a du mal à imaginer cela de nos jours.... et pourtant, certains voulaient encore "servir" la patrie... J'ai beaucoup d'estime pour eux!
Merci pour ce témoignage, j'aurais aimé que mon père me parle de cette période, lui qui était dans le maquis.......
Bises du jour de Mireille du Sablon
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Mardi 24 Mai 2016 à 13:11
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25daniel63Mardi 24 Mai 2016 à 09:30Je pense que le STO n'a été "inventé" que bien plus tard ( 42?) . Mais nul ne savait ce que serait l'avenir , et être déserteur en temps de guerre n'est pas un statut enviable ....
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Mardi 24 Mai 2016 à 13:07
daniel 63: Merci.J'ai écrit sans réfléchir .Le STO débute en juin 1942 .Voir ici pour des renseignements précis .
Voici "Le déserteur " par Boris Vian.
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26H2O-Jeudi 26 Mai 2016 à 19:49Bonsoir Nicole, toutes mes excuses pour cette longue absence des blogs.
C'est un beau et précieux témoignage historique. Cette guerre est peu documentée par ceux qui l'ont vécue et c'est urgent de conserver et de partager cette histoire. Mes grand-pères étaient trop vieux et mon père trop jeune mais ma mère parlait un peu de cette période où il y avait de beaux et jeunes réfugiés près de chez elle...
Bises de la Combraillaise
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Jeudi 2 Juin 2016 à 22:45
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J'ai rattrapé mon retard en lisant les deux premières parties d'abord. Quel témoignage ! Et ton papa a vraiment bien fait de transmettre ce moment de vie, si important pour lui et d'autres, afin que l'on sache à quel point la guerre n'est pas une partie de plaisir ! Merci Nini pour ce partage.
Gros Becs !
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Jeudi 2 Juin 2016 à 22:48
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ce sont des moments de vie qui ont bien marqué les militaires de 1939 et plus, ton père donne bien des détails du vécu malgré son âge. Renée
Campanule : Merci.Mon père a toujours donné beaucoup de détails quand il racontait sa drôle de guerre .Et là , j'ai pensé que je devais l'écrire , que c'était presque un devoir de mémoire pour ses petits -enfants et arrière petits -enfants .Nous, les trois enfants, nous connaissons tout cela depuis longtemps.
Bonsoir ALN,
Quelle débâcle. Des soldats courageux auxquels je pense chaque jour grâce à l'actualité. Ils ont défendu notre pays et voilà que dans les inaugurations, on fait courir les gamins dans le cimetière militaire. Comment ne pas penser à ces Hommes ? Les récits comme celui de ton père devrait être lu dans les écoles. Seuls les soldats peuvent relater l'histoire.
Je te souhaite une bonne soirée.
Marie Jo 21: Merci. Le récit de mon père intéresse mes petits enfants.Mais je ne suis pas sûre qu'il faille le lire dans les écoles.Certains, plus glorieux, y sont lus.
Dans les classes, on leur parle de la guerre. Quand je bossais, je leur en ai parlé de la débâcle et pour eux , c'était difficile à comprendre car c'était une sorte de fuite devant l'ennemi ( élèves de 9 - 10 ans )
Quant à la course organisée à Verdun, c'est une honte ! Je ne considère pas que les jeunes participants soient responsables de cette mascarade.
Pour la place réservée à la seconde Guerre Mondiale dans les programmes scolaires , tu peux lire ici
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Mardi 7 Juin 2016 à 19:21
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32alrogaDimanche 19 Juin 2016 à 22:18Je vois ton lien Nicole vers les programmes scolaires, c'est marrant, je me disais justement qu'il m'avait semblé entendre qu'ils voulaient supprimer les programmes sur la 1ère guerre mondiale des manuels scolaires, ai-je rêvé?
Je trouve cela vraiment passionnant et interessant que ton papa raconte. Il y a tant de soldats qui ne voulaient plus en parler, oublier, ne pas raviver leurs souvenirs.
C'est en effet un très beau témoignage pour vous ses enfants et petits enfants.
Je t'embrasse Nicole. Tu as vu comme je suis à la traine...!!
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Lundi 20 Juin 2016 à 10:16
Alroga: Je suis à la traîne, moi aussi .
En ce moment , bien malins sont ceux qui connaissent les programmes de la prochaine rentrée ."Faire et défaire " c'est l'activité de la ministre actuelle.
On veut supprimer beaucoup d'autres choses, très importantes ...Je suis toutes les "divagations " ministérielles actuelles ( pour l'EN seulement ).
Je mettrai dès que possible un enregistrement de mon père qui est déjà réalisé.Aujourd'hui, je vais lui rendre visite dans la maison de retraite où il vient juste d'entrer ( à 97 ans passés ).Belle journée!
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une sacrée débandade, quand même!